Dans son documentaire On avance à ton rythme : quand j’ai décidé de coacher ma maman pendant son cancer, la coach sportive Alexia Cornu documente l’accompagnement sportif qu’elle a mené avec sa mère, atteinte d’un cancer digestif. Un récit à hauteur de corps sur le sport adapté, la confiance retrouvée et le lien mère-fille, en complément du parcours médical.
Extrait documentaire “On avance à ton rythme” YouTube
Pendant longtemps, le sport a été raconté comme une affaire de performance, de dépassement, de jeunesse. L’histoire que livre Alexia Cornu prend le contrepied de ce récit dominant. Avec son documentaire On avance à ton rythme : quand j’ai décidé de coacher ma maman pendant son cancer, elle raconte un corps que l’on réapprivoise, même quand il est fragilisé, même quand il a été profondément abîmé par la maladie.
Cette histoire commence bien avant le cancer. Il y a seize ans, alors qu’elle est encore étudiante en STAPS, Alexia choisit déjà sa mère comme point d’ancrage de son travail universitaire. À l’époque, cette dernière a 47 ans, est en périménopause et n’a pas fait de sport depuis trente ans. « Je voulais proposer quelque chose pour aider à reprendre confiance en soi, pas uniquement pour la performance », explique-t-elle. Son mémoire s’articule autour de trois piliers : activité physique, nutrition et estime de soi. Les résultats sont immédiats et mesurables. « En six mois, avec un programme pas hyper ambitieux, on arrivait à des résultats incroyables. » Le sport devient alors, pour Alexia, un outil d’empouvoirement bien plus qu’un objectif physique.
Même lorsque sa carrière la mène aux États-Unis en 2014, puis vers la digitalisation de son activité pendant le Covid, cette approche ne la quitte pas. Elle continue de développer le sport-santé, en particulier auprès des femmes ménopausées. En 2022, elle s’installe au Portugal pour se rapprocher de sa famille. Deux ans plus tard, sa mère est diagnostiqué d’ un cancer endocrinien digestif, puis suit une lourde laparotomie, un corps profondément éprouvé. C’est à ce moment précis que naît le projet du documentaire. Alexia reprend son rôle de coach, mais dans un cadre entièrement réinventé. « Quand je dis reprendre le sport, c’est qu’on a repris la respiration. » Pas de course, pas de performance : posture, périnée, respiration, centre du corps. Repartir des bases pour restaurer la confiance. « Il fallait vraiment retrouver la confiance, repartir de l’essentiel. » Puis vient une question clé, presque lumineuse : « Je lui ai demandé de quoi elle rêvait. » raconte Alexia Cornu.
Faire partie de l’aventure
La réponse ouvre un horizon inattendu. Courir un trail de 10 km en Bretagne, face à la mer. Et surtout, intégrer une cordée de patients pour gravir le pic de l’Étendard, à 3 500 mètres, aux côtés d’un oncologue convaincu, lui aussi, que le mouvement soigne. « Elle m’a dit : “J’aimerais être suffisamment en forme pour qu’on me choisisse et faire partie de l’aventure.” » L’entraînement devient alors une matière vivante, mouvante, jamais figée. « C’est beaucoup de fractionné, beaucoup de patience. Il y a eu des grosses pauses, des blessures, d’autres interventions, le traitement… On adapte en permanence. » Alexia travaille avec des checkpoints, mais sans rigidité. « Quand ça va bien, on augmente un peu. Quand ça ne va pas, on change. Quand elle ne peut pas, on ne fait pas. » Une philosophie qu’elle applique depuis des années auprès des femmes ménopausées. « Les fluctuations d’énergie et de morale vont de pair. Le rôle de l’entraîneur, c’est de rassurer en permanence. » décrypte-t-elle.
Le documentaire montre aussi combien le premier obstacle est mental. « Il y a une grande partie qui se passe dans la tête, mais pas en mode “il faut être motivée”. Plutôt : il faut recroire en ses capacités. » Alexia le martèle, tout est possible, à condition de partir de là où l’on est. « Il ne faut pas commencer à l’endroit où on était il y a vingt ans. » À 64 ans, avec un cancer digestif, sa mère a couru, gravi, résisté. « Elle n’avait jamais couru 11 kilomètres, jamais fait d’alpinisme. » Le film déconstruit aussi les discours réducteurs sur le corps des femmes après 50 ans. Trop souvent cantonné à la douceur, au yoga ou au pilates, le sport est ici revendiqué comme un espace de force. « Le fait de soulever des charges, même légères, change tout. Quand elles se sentent fortes dans leur corps, elles se sentent fortes dans leur tête. » Cette force devient un socle, notamment dans une période de bouleversements hormonaux où les repères vacillent.
Alexia insiste cependant sur une ligne claire, le sport ne remplace pas les traitements médicaux. « Ça ne remplace pas un traitement, mais c’est complémentaire. L’un aide l’autre. » Le documentaire donne à voir cette alliance entre soin médical et mouvement, entre corps et psychisme. « Le sport est une antalgie fabuleuse », dit-elle, rappelant que les bénéfices sont aussi physiologiques que mentaux. Filmé sans producteur, autofinancé, réalisé avec son vidéaste habituel, On avance à ton rythme sera diffusé gratuitement sur YouTube. « Je ne voulais pas en faire un produit. Je voulais qu’il soit vu par le plus grand nombre. » L’ambition est claire, « Donner de l’espoir, montrer que c’est possible à tout âge. ». Un film pensé aussi pour celles et ceux qui ont perdu un proche, pour celles qui doutent, pour celles à qui l’on a trop souvent dit que c’était “trop tard”.



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