Et si on arrêtait de taire la ménopause ? Dans un rapport choc, Stéphanie Rist propose 25 mesures pour que cette étape naturelle de la vie des femmes devienne — enfin — une priorité de santé publique.
Remis mardi 9 avril au gouvernement, le rapport de la députée Stéphanie Rist veut poser les fondations d’une révolution sanitaire et sociale : faire de la ménopause une véritable priorité de santé publique en France. Après six mois de travail, 139 auditions et plus de 2 000 témoignages collectés, les conclusions sont sans appel : la ménopause reste un tabou, un angle mort de la médecine et du monde du travail. « La ménopause est un sujet entouré de honte et de silence. Briser ce tabou est une urgence », affirme l’élue de la 1ère circonscription du Loiret dans son introduction. Le rapport, épais de 177 pages, formule 25 propositions concrètes pour en finir avec l’ignorance et le déni.
La ménopause concerne près de 17 millions de femmes en France. Une femme sur deux présente au moins un symptôme important (bouffées de chaleur, troubles du sommeil, anxiété, douleurs articulaires) et 25 % souffrent de troubles sévères qui affectent directement leur qualité de vie. Pourtant, dans l’imaginaire collectif, cette étape est encore perçue comme un détail, une affaire privée, presque honteuse. « On me disait : “C’est normal, prenez sur vous”. Mais on ne vit pas 10 ans de douleurs et d’insomnies par simple fatalité », témoigne une femme interrogée dans le cadre du rapport.
Les chiffres révèlent eux aussi l’ampleur du déni : seulement 2,5 % des femmes bénéficient aujourd’hui d’un traitement hormonal de la ménopause, alors même que de nombreuses études récentes ont revalorisé leur intérêt thérapeutique, loin des polémiques des années 2000.
Trois chantiers pour changer le regard sur la ménopause
Face à cette réalité invisible mais massive, le rapport Rist dessine trois axes d’action majeurs : mieux informer, mieux soigner, mieux protéger.
D’abord, il s’agit d’informer et de sensibiliser. Le rapport souligne l’urgence d’introduire la ménopause dans les programmes scolaires, dès le collège. Parce que c’est dès le plus jeune âge que se construisent les représentations sociales, il est essentiel que garçons et filles soient éduqués sur ce sujet longtemps relégué aux conversations privées. Pour toucher toutes les générations, la députée recommande également de moderniser les campagnes publiques en s’appuyant sur les réseaux sociaux et les influenceurs. « La méconnaissance engendre la peur et la solitude. L’information est une arme pour rendre aux femmes la maîtrise de leur corps », insiste Stéphanie Rist.
Le deuxième levier concerne l’accompagnement médical.
Trop souvent négligée par les professionnels de santé, la ménopause doit faire l’objet d’une prise en charge spécifique. Le rapport propose ainsi de créer une consultation longue dédiée, accessible dès 45 ans et intégralement remboursée, pour évaluer les risques cardiovasculaires, osseux et métaboliques.
Il insiste également sur la nécessité de renforcer la formation des médecins généralistes et gynécologues, afin qu’ils ne réduisent pas la ménopause à quelques symptômes gênants, mais qu’ils en appréhendent toute la complexité. « La ménopause n’est pas un événement ponctuel. C’est une transition biologique qui modifie durablement la santé des femmes », rappelle la députée.
Enfin, le rapport invite à prendre en compte la ménopause dans le monde du travail.
Aujourd’hui encore, parler de ses symptômes en entreprise reste un tabou absolu. Pourtant, la fatigue chronique, les troubles du sommeil ou les douleurs articulaires pèsent lourdement sur la vie professionnelle. Le rapport recommande d’intégrer systématiquement la question de la ménopause dans la visite médicale de mi-carrière à 45 ans, de mettre à disposition des employeurs un guide pratique, et de favoriser des mesures d’adaptation simples : aménagement des horaires, télétravail, climat intérieur adapté.
Autre proposition phare : le lancement d’une étude nationale sur le coût économique de la ménopause en milieu professionnel. Objectif : documenter l’impact réel sur l’absentéisme, la baisse de productivité, les départs anticipés ou encore les pertes de talents, souvent sous-estimés.
« La ménopause n’est pas un handicap, mais elle ne doit pas être un frein à la carrière », martèle Stéphanie Rist, qui insiste sur la nécessité de sortir d’une approche individuelle pour reconnaître une problématique collective.
Mettre enfin des mots sur la ménopause est une avancée essentielle. Mais sans mobilisation collective — des médecins, des employeurs, des institutions — ces propositions risquent de rester lettre morte. Ce rapport pose les bases, mais c’est la société toute entière qui doit changer son regard.